Macron-Mélenchon frères jumeaux ?

Et si, finalement, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon étaient frères jumeaux en politique ?

Ils présentent en effet plusieurs points communs, que les analyses, éclairages, interviews, décryptages parus au fil des mois mettent de plus en plus en exergue. A partir de constats tirés de prises de position, de leurs discours, de leurs engagements, il est plus que frappant de remarquer des similitudes qui ne s'imposaient pas a priori comme des évidences.

Ils détestent tous les deux les journalistes. Ils affichent pour la presse un mépris qui ne laisse pas d'inquiéter sur la profondeur réel de leur respect pour la démocratie, toute la démocratie, à savoir le frottement des désaccords.

Mélenchon et Macron revendiquent diriger un mouvement et non un parti. Ce qui en dit long sur leur conception de la vie politique, leur méfiance vis-à-vis des corps intermédiaires. Mélenchon se définit comme l'alpha et l'oméga, Macron dirige (encore) son parti de la même manière et gère la France comme une entreprise,  à la verticale, ou la citoyenneté ( et donc l'esprit  critique) a très peu de place. Comme les députés LREM viennent de s'en apercevoir, ceux ayant osé des amendements à titre personnel et même en petits comités, étant fermement priés d'y renoncer.

Macron et Mélenchon sont présentés comme des acteurs politiques cultivés, vertu qui n'était pas spontanément prêtée à Hollande et Sarkozy.  Mélenchon est un homme qui a puisé depuis longtemps sa culture dans ses innombrables lectures, il témoigne de références, d'un lexique soutenu. Macron est souvent cité comme une belle mécanique intellectuelle, mais son insistance, ou celle de ses proches, à rappeler qu'il fut l'assistant de Paul Ricoeur, révèle une faille : celle de mesurer combien sa culture est perçue comme un vernis utilitariste pour enrober une approche plus idéologique que les apparences.

Macron et Mélenchon, en dépit de  ces qualités, ont aussi le verbe haut, aiment jouer les tribuns, prononcer des discours interminables, et lâcher des petites phrases qui dérapent très vite en termes grossiers, méprisants, voire insultants.

J'avais écrit il y a quelques mois que Mélenchon jouait les idiots utiles de Macron. J'avais récolté des critiques acerbes. Estimant que je vis dans un pays où la liberté d'expression n'est pas encore fondamentalement menacée (sauf par les crétins et sectaires, mais ça, c'est la vie), je persiste donc et je signe.

Unis tous les deux dans un objectif de destruction de " l'ancien monde", le dégagisme pour Mélenchon, et une force schumpétérienne pour Macron,  je commence à me demander si leur vision ne se rejoint pas pour nourrir un populisme partagé : plus revendiqué et plus rugueux chez Mélenchon, plus dissimulé et plus soft chez Macron. Illustrant à leur manière le vide sidéral faute d'idées constructives et visionnaires dans le monde politique après l'éclatement et la déroute des structures traditionnelles.

Philippe RIVET