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Diagonales de l'actu

Quand les variants mosellans sont surtout politiques, ce que raconte la visite-éclair de Véran à Metz

14 Février 2021 , Rédigé par Philippe Rivet

Quand les variants mosellans sont surtout politiques,   ce que raconte la visite-éclair de Véran à Metz

De prime abord, on pourrait être tenté de partager le désappointement des élus mosellans - " tout ça pour ça "- après la visite (presque) sans suite d'Olivier Véran vendredi à Metz. Sauf que cet aller-retour ministériel en raconte plus que la temporisation retenue par le gouvernement face à la levée protestataire d'élus mosellans.  Il rappelle la tradition qui reste bien ancrée en Lorraine, et en Moselle en particulier, d'en appeler, non sans véhémence, systématiquement à l'Etat dès qu'une situation devient difficile à gérer.

Certes, le gouvernement n'a promis, pour l'instant, qu'une augmentation - jugée insuffisante et il est vrai minime avec 2000 doses - du nombre de vaccins pour un département où le taux d'incidence est particulièrement haut (mais en baisse néanmoins selon les derniers chiffres).

L'on peut aussi se dire que, pas plus que les habituels "sachants" parisiens, les élus locaux ne possèdent la science infuse, et que la vérité ne s'indexe pas aux décibels des déclarations des uns et des autres, à la surenchère qui conduit la démagogie débridée à remplacer la compétence médicale supposée. Et surtout à supplanter l'humilité qui devrait pourtant s'imposer, qualité rare en politique.

Pour autant, il est difficile d'affirmer à ce jour que le ministre de la Santé n'a pas écouté les élus locaux. Ecouter ne veut pas forcément dire entendre. Mais il disposait d'éléments chiffrés qui ne laissent pas entrevoir à ce jour une possible remontée exponentielle de la contamination. Les élus locaux non plus. S'il ne se passe rien de terrible dans les prochains  jours, il sera facile à Véran d'invoquer la raison pour justifier son choix. Si la pandémie progresse fortement, il sera néanmoins plus difficile pour les élus locaux d'ose affirmer sur le ton péremptoire dont certains usent volontiers : " On vous l'avait bien dit". 

Car contrairement à sa directrice d'hôpital, au verbe aussi haut qu'au printemps,  le patron des urgences de l'hôpital de Metz, sur Europe 1, se montre d'une pondération qui sied aux professionnels à la tête froide, et vient à contredire la première.

Ce qui nous amène à évoquer le premier variant mosellan, non pas celui que pose en hypothèse, sans preuve pour l'instant, le président du CHR messin, mais le maire de Metz, le même qui reprochait à Mathieu Klein et à Jean Rottner de vouloir faire le buzz juste après Noël en appelant à un reconfinement rapide. Le contexte était différent :  la période était plus propice à tenter un reconfinement court pendant les vacances scolaires et celles de bon nombre d'entreprises que maintenant.  On a pu note la prise de distance prudente du président de la région vis-à-vis du maire de Metz, et il faudrait un billet complet pour décrypte la solidarité formelle affichée par le maire de Nancy.

Faut-il rappeler que les mêmes qui joignent leur voix à l'exigence d'un reconfinement aujourd'hui étaient ceux-là même qui accusaient naguère le président de la République de mettre à mal l'économie avec le confinement. On décèle bien aussi en passant l'arrière-pensée politicienne qui consiste à demander le confinement pour un département, ce qui poussait à terme l'exécutif à reconfiner tout le pays...Brandir l'étendard sanitaire n'exclut pas de poursuivre le combat partisan à cinq mois des régionales et treize mois de la présidentielle.

Aujourd'hui, on peut relever que l'argumentaire mosellan est chargé de l'incertitude des variants sud-africain et brésilien. Mais ces derniers ne mettent pas en péril pour l'instant ni le système hospitalier ni le monde éducatif (14 cas positifs sur 5000 tests en milieu scolaire). Peut-être que demande de l'aide au CHRU de Nancy serait une atteinte à la fierté de certains ou certaines ?  On notera en passant que l'appel aux marins-pompiers de Marseille pour surveiller les eaux usées peut sonner comme un mépris pour le labo LCPME de Nancy, l'un des piliers du réseau Obépine qui analyse déjà les eaux usées, dont celles de Metz. Mais après tout, plus il y a de bonnes volontés...

Crier au loup, ou pleurer avant d'être battu, est forcément contreproductif. Surtout quand l'assise des propos est fragile. Répéter à l'envi - avec l'espoir sans doute d'en faire une vérité inattaquable - qu'il faut fermer les écoles  car elles sont un lieu de contamination, est non seulement invalidé par les chiffres précédemment évoqués, mais c'est tout simplement confondre la cause et la conséquence.  Tous les spécialistes sont d'accord pour affirmer, sur la foi de travaux scientifiques et non pas au doigt mouillé, que les contaminations surviennent dans la sphère privée.

S'il est étonnant que le protocole sanitaire soit assoupli en cas de virus classique, il est en revanche durci en cas de présence détectée de variants. Le principe de précaution adopté tant par l'Education nationale que les autorités sanitaires devrait conduire à une fermeture plus élevée de classes ou d'établissements, ce qui reste infiniment préférable à la fermeture systématique, avec les conséquences pédagogiques, sociales, psychologiques que les avocats d'une telle mesure seraient bien inspirés de prendre en compte.

Car le plus dur reste à venir. En pleine incertitude, les vacances vont-elles constituer des accélérateurs de clusters, alors qu'est déjà observé un certain relâchement à l'école , confiait un syndicaliste la semaine dernière ? Comment anticiper alors sur la rentrée, le dépistage massif, la vaccination accélérée, pour les personnels par exemple ?

Peut-être que d'ici là, les discours se seront fluidifiés,  ou nourris de la raison qui doit primer dans l'action politique, en reconnaissant, comme le préfet de Moselle l'a fait dans une litote remarquable, " l'interdépendance" avec les voisins. Quand on est sous perfusion luxembourgeoise, difficile de mordre la main de celui qui vous nourrit. Même s'il avait relâché la bride début janvier avant d'être contraint de la resserrer.

Mais il va bien se trouver un esprit messin pour accuser les Nancéiens de propager le virus en Moselle. On parie ?

Philippe RIVET

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