Société civile : un concept en trompe-l'oeil

S'il était encore besoin de le rappeler, cette campagne électorale nous démontre, une fois de plus, et furieusement, que le  concept de société civile n'est qu'un concept en trompe-l'oeil dont on pressent très vite les limites.

Comme si d'un côté il y avait des professionnels de la politique, coupés de la "société" et de l'autre des "gens" qui vivraient indépendamment des décisions prises par ces politiques. En réalité, il y a bien une seule et même société, certes fragmentée, fracturée, écartelée, mais unique quand même, au sein de laquelle on vit de plus en plus côte à côte et non plus avec.

Mais rappelons quand même que : ces politiques tant décriés (certes pas toujours à tort, car beaucoup ont oublié dès le lendemain de leur élection le lien censé les unir aux citoyens), sont issus de la société civile, ils ont été enfants, élèves, étudiants, stagiaires parfois, avant d'être, pour certains, happés par  ce qui est, quoi qu'on en dise, un métier, en tout cas une occupation à plein temps, voire plus, si on veut bien faire le job.

Relevons aussi que les candidats issus de la société civile sont aussi des citoyens, qui pensent, qui votent (enfin, faut l'espérer), qui défendent donc des options politiques aussi. Et ne sont donc pas vierges de toute conviction. La " République en marche" se gargarise de ses 52 % de candidats issus de la société civile.

C'est pousser le bouchon un peu loin. C'est nous prendre aussi des vessies pour les lanternes : société civile, ces conseillers de ministres, ces hauts fonctionnaires marqués politiquement ? C'est ça faire de la politique autrement ? Non, c'est vouloir faire de la politique à la place de l'autre, le sortant. C'est de bonne guerre. Mais les habillages ont comme un air de déjà vu et entendu.

Se présenter à une élection, c'est assumer ses choix, ses options. C'est s'engager à tenir ses promesses, et vraiment les tenir ensuite. Comme la limitation des mandats dans la durée. La moralisation de la vie publique. C'est là qu'on verra si la " société civile" fera mieux, ou moins bien encore, que les sortants. Certains feront le choix de leur donner leur chance, d'autres pas. Vive la démocratie. Pourvu qu'elle évite les extrêmes mortifères.

Philippe RIVET