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Diagonales de l'actu

Taubira, une icône, vraiment ?

30 Janvier 2016 , Rédigé par Philippe Rivet Publié dans #politique

Taubira, une icône, vraiment ?

Quel emballement pour célébrer ou accabler l'ex garde des Sceaux au moment de son départ qui ressemble fort à une démission forcée. Ce qui enlève donc un peu beaucoup du panache que d'aucuns se sont précipités à souligner sans le moindre recul.

On a senti la gauche embarrassée et partagée entre soutiens parlementaires éparses et déclarations visant à tourner la page rapidement, et la droite qui ne l'était pas moins, partagée entre un sentiment de soulagement, et une forme d'hommage à une femme soudainement présentée comme l'incarnation du courage et fidèle à ses convictions.

Si l'on ne comprend toujours pas quelle mouche a piqué Hollande de nommer Chirstiane Taubira au gouvernement, à la Justice de surcroît, il n'est guère plus aisé de saisir non plus pourquoi la droite en a fait sa cible préférée, alors qu'au final, elle n'a pas été plus ou moins laxiste que ses prédécesseurs, ni plus brillante ou inconstante que d'autres avant elles, à droite comme à gauche. Et que quand certains réacs ( de gauche comme de droite) la couvrent de commentaires tout aussi vulgaires que racistes parce qu'elle a mené le verbe haut et ciselé la bataille du mariage pour tous, ils oublient de rappeler que le sujet transcendait les clivages politiques traditionnels. Et que l'invective au bord des lèvres dessert plutôt la politique qu'elle ne l'enjolive.

Par ailleurs, cela relève, pour l'instant, faut bien l'avouer, de la mission impossible d'expliquer comment et pourquoi Taubira est devenu, aux yeux d'innombrables commentateurs moutonniers, l'icône de la gauche. Avec le départ de Taubira, la droite perd sa principale tête de turc, et ce n'est donc pas une bonne nouvelle pour elle. Mais avec ce même départ, le gouvernement ne perd pas la grande prêtresse de la gauche de la gauche qui aurait incarné le dernier marqueur de gauche de l'équipe Valls.

La mémoire courte est devenue la règle en commentaires politiques. Il a fallu attendre et entendre un Onfray (agaçant à bien des égards) mais pour le coup très factuel et rigoureux, pour rappeler que Taubira avait voté la confiance à Balladur en 93, qu'elle avait fait équipe avec Tapie (et ça ce n'était pas pour aider le PS), qu'elle s'était présentée à la présidentielle en 2002, et que sa candidature n'était pas spécialement destinée à aider Jospin. Taubira icône de la gauche ? Son micro-parti guyanais nage dans l'ambiguïté permanente, et elle n'est pas passée, jusqu'à présent, pour la pasionaria soulevant les foules et rassemblant les forces vives de la contestation. Il y a parfois des constructions d'image tout à fait artificielles qui laissent pantois.

Si personne ne contexte son maniement du verbe, son exaltation cultivée, sa posture symbolise pour l'instant une aventure très personnelle et solitaire, comme c'est le cas depuis qu'elle a émergé dans le paysage politique. Si elle a subi des assauts et des avanies qui discréditent foncièrement leurs auteurs, elle n'a jamais cherché de son côté à manifester une empathie qui marquerait les esprits. Restera-t-elle revêche, ou deviendra-t-elle revancharde ? Mais avec quelle audience ?

Philippe RIVET

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